INTERMEDE MUSICAL TRAPPES peut s’écrire sous toutes les formes. A preuve, ce 32e chapitre qui rime richement et qui pourrait être un tube estival! A vous de juger la plume de Ludovic Dabray et/ou Joël Cerutti.
32.
Voile sur les filles, barques sur le Nil, je suis dans ta vie, je suis dans tes bras…
Perdus dans les alpages, Gérard et sa Brigitte
Coulaient des jours bien sages, loin de ce qui s’agite.
Quand la marmotte Georgette sortit de son terrier
Elle n’avait dans la tête que de les observer.
Brigitte était enceinte, Gérard était bûcheron
Ils n’avaient plus de craintes, leur vie tournait bien rond.
Plus de nouvelle de Bill, ni du sieur Vaucresson.
Partir loin de la ville ? Ils avaient eu raison.
Les deux petites jumelles, Pong Ping et puis Ping Pong
Devaient s’ennuyer ferme à faire de la chaise longue
Quant à la Pranmwadoncq aux instincts criminels
Il ne lui restait plus que les points de dentelle.
Dans trois mois un berceau, un garçon ou une fille,
Viendrait sur ces coteaux enrichir la famille.
Eux qui pensaient l’ennui issu de l’inaction
Jouissaient de la pluie, fuyaient l’insolation.
Elle qui n’appréciait pas de passer en cuisine
Faisait des petits plats humectant les babines.
Son rôle de futur père motivait le Gérard
Qui dans le bricolage s’exprimait avec art.
Il avait fabriqué de ses doigts avertis
Une chambre de poupée et aussi un beau lit.
L’enfant qui allait naître serait bambin choyé
Dans le fond du jardin, ils plantèrent un noyer.
C’est ainsi que les jours s’écoulaient tout là-haut
Des jours de joie sereine dans l’attente d’un marmot.
Faisant fi du mariage, par l’amour qu’ils se donnent,
À une vie sans histoire, les deux amants s’adonnent.
Chaque matin la marmotte se levait de bonne heure
Et les regardait vivre avec le même bonheur
Georgette en est jalouse, elle voudrait un marmot
Mais elle est solitaire, c’est le pire de ses maux.
Parfois au coin du feu, Gérard passait le temps
À faire une patience, ou à lire un roman.
Brigitte tricotait des chaussons, des layettes
Les bûches crépitaient pour se joindre à la fête.
Point de télévision, pas plus que de radio,
Loin du monde, loin du stress, loin de tout ces idiots.
Rarement à la ville, les amants se rendaient
La nature, prodigue, de tout leur proposait.
Chez le gynécologue d’un village voisin
La future mère s’enquiert que bébé allait bien
Grossesse sans problème sur un flanc de montagne
Là où l’air est si pur, au sein de la campagne.
En débitant ses bûches, pour le prochain hiver,
Gérard entonne souvent « Le Sud » de Ferrer
En ce beau mois de mars, Brigitte chante elle aussi
Ou sifflote gaiement des airs de Vivaldi.
Et quand les soirs d’orage, blottie contre Gérard
Elle feint d’avoir peur, il ne la laisse pas choir
Il la prend dans ses bras et c’est un homme câlin
Qui réchauffe son cœur et qui lui tient la main.
Calfeutrée dans son antre quand le temps est mauvais
Georgette, la marmotte, se dit : « Ah si j’avais
Un homme comme Gérard, je serais bien heureuse,
Car j’ai peur dans le noir et ça me rend nerveuse »
Amis lecteurs, c’est rare, surtout dans un roman
Qu’une marmotte parle, pardonnez ces moments
Pensez que bien plus tard, dans un prochain chapitre
Vous comprendrez pourquoi et surtout à quel titre.
Oui, depuis le début, vous vous interrogez
Mais où nous emmènent-ils, où est leur apogée ?
Nous ne le savons point et c’est pour ça qu’ici
Une marmotte vous parle de ses petits soucis.
Pendant ce temps, là-haut, dans ce joli chalet
Gérard a mis la table et tout ce qu’il fallait
Dans son lit dame Brigitte sent l’odeur du café
Ou de l’Ovolmaltine ou bien du pain toasté.
Elle traînasse, elle paresse, mais son Gérard l’attend
Le petit-déjeuner est un temps important
Ainsi pour rien au monde il ne voudrait manquer
D’assister au lever de sa femme bien aimée.
Car c’est au saut du lit qu’elle est resplendissante
Quand la brume dans ses yeux la rend tellement craquante
Ses lèvres purpurines qui soulignent sa bouche
Sont encore plus pulpeuses au sortir de la couche.
Elle a une faim de loup, surtout ce beau matin
Bébé mange sa part, et ça ce n’est pas rien
Et puis surtout hier soir, avant de s’endormir
Les deux amants se sont amusés à frémir.
Il est rare que deux soirs, même consécutifs,
Il s’écoule du temps à demeurer passifs
Gérard aime dormir nu et la Brigitte aussi
Le contact de leur peau les amène aux déduits
Dans le silence des bois, des prairies, des campagnes
Brigitte monte à l’assaut de son mat de cocagne
Le bruit de leurs ébats trouble cette chère Georgette
Bien déçue d’être privée du même genre de fête.
Dans ce roman spécial, pondu à quatre mains
Vous aurez même eu droit à des alexandrins
Surtout en notre siècle, le fait n’est pas courant
D’où l’effet de surprise chez mon cher concurrent
C’était la seule façon de rendre à mon copain
Que dis-je à mon ami car, oui, je l’aime bien
Qui a mis les héros dans un repos forcé
La monnaie de sa pièce, il est bien avancé.
Il va devoir reprendre, où il les a laissés
Les rênes de l’histoire qui n’a pas avancé
Moi, je me suis bien plu, à écrire ce poème
Et le plaisir d’écrire est bien celui que j’aime.
Vas-y donc mon ami, retourne sur la montagne
Va libérer Gérard et sa tendre compagne
Poursuis donc cette histoire au chapitre trente-trois
Je t’attends de pied ferme, je sais que tu me crois.
La barrière des cinq mille est maintenant atteinte
J’achève d’écrire ici ce chapitre et cette feinte
Longue vie à notre « Trappes » et sois bien convaincu
Qu’en cas de farces, d’attrapes, tu l’auras dans le …