PARASITES   Dans ses déboires avec des administrations, Narcisse Praz ne s’est pas que trouvé face à des bornés genevois. Il a aussi été confronté aux parasites bernois. Ce qui a été presque pire! Immersion dans les « joies » de l’Icha et autres impôts. Un pur bonheur mathématique!

Berne, alors! Faut remonter à 1939, le début de la guerre. Non, hé! Rassure-toi. J’avais dix ans à cette époque, trop candide pour me battre contre l’Etat, l’ennemi. Mais à Berne, on concoctait à cette époque-la une loi qui devait me donner maint fil à tordre et retordre quelques années plus tard: la loi instituant, à titre provisoire la perception de l’impôt sur le Chiffre d’Affaires, alias l’Icha et le Wust (remarquez, en passant, que cette abréviation de Waren Umsazsteuer signifie, en dialecte, sale, repoussant: autrement dit, vachement bien nommé!).

Joyeux anniversaire, Monsieur Icha! Pour du provisoire, on peut dire que vous avez bien tenu le coup!

Remarquez aussi, en passant, histoire de rigoler un coup, que ce provisoire, prévu pour permettre à la Confédération de faire face aux dépenses extraordinaires de la guerre dure depuis quarante ans. Tiens! Joyeux anniversaire, Monsieur Icha! Pour du provisoire, on peut dire que vous avez bien tenu le coup! Et que vous vous portez bien. Vous vous portez d’autant mieux que ce sont les socialistes, grands amis de l’Etat s’il en fut, qui administrent régulièrement les départements en question. Mais pas à l’époque où je commis mon Crime. Là, c’était le génial Roger Bonnepiquette.

Faut vous dire qu’ils ont eu tout loisir, les parasites de l’Effingerstrasse à Berne, de modeler la matière, depuis lors et le temps qu’il dure, cet impôt proclamé juré provisoire en 1939.

Après le législateur, qui avait un esprit, lui, vinrent les parasites de la Fonction qui en étaient démunis, eux.

Tenez, par exemple: le mot “exportation” ne figure à aucun endroit de la loi initiale, tant il était évident que les marchandises exportées seraient exemptées de cet impôt de Consommation intérieure. Tel était l’esprit du législateur. Mais après le législateur, qui avait un esprit, lui, vinrent les parasites de la Fonction qui en étaient démunis, eux. Mais pas démunis de vices pour leurs tours de vis et de cochons. C’est ainsi qu’à force de règlements, de paragraphes et d’alinéas ajoutés à la loi initiale (qui ignorait jusqu’au mot «exportation»), ces petits merdeux de fonctionnaires sont parvenus à ce résultat, entre autres cent et cent plaisanteries du même ordre, à décréter souverainement que la seule preuve acceptée et acceptable pour attester qu’une marchandise avait été exportée était le formulaire douanier (19 HO pour les initiés de l’horlogerie).

La seule preuve acceptable.

Frottez-vous les yeux.

Devant n’importe quel Tribunal normalement tribunal, si vous amenez un témoin attestant qu’il a vu mes 1’000 montres quitter le territoire suisse pour s’engouffrer en territoire italien, vous avez gagné. Le témoin, au demeurant, est passible de prison en cas de faux témoignage. Chacun sait cela.

Eh bien, j’ai essayé avec l’Icha. Non pas avec un témoin, mais avec cinq ou six témoins, chacun venant déclarer que les montres avaient quitté le territoire Suisse pour s’en aller en Turquie ou en Italie.

(à suivre…)

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