TOUJOURS PRETS   En cinq ans et demi, la Cave Tsallin de Vétroz a connu au moins quatorze contrôles. Un record absolu qui ne serait pas étranger à certains lobbys politiques. Quand les consuls de Russie et du Portugal évoquent une certaine discrimination, ils ne sont pas à côté de la plaque !  

Comment faire crever une petite cave valaisanne ? Depuis octobre 2008, la famille Mathier s’acharne sur celle d’Antonio Pinho à Vétroz. Pensez ce petit Portugais qui leur livrait des vendanges a eu le culot d’ouvrir, avec son épouse Natalia, la Cave Tsallin ! Pour arracher ce cep rebelle, les Mathier ont déployé plusieurs stratégies.

Un million non payé

En premier de ne pas payer le raisin que leur a livré Pinho, ce qui laisse une ardoise qui dépasse largement le million. Dès lors, la Cave Tsallin rame pour régler ses fournisseurs et a, environ, une année de retard dans le paiement de la location de ses vignes.

Dès son ouverture et jusqu’à présent, la Cave Tsallin a été contrôlée au moins quatorze fois !

En plus du million en plan, les Mathier, qui financent les campagnes politiques des PDC «noirs» du Haut-Valais, utilisent d’autres moyens pour achever la cave. Quand ils sollicitent l’administration valaisanne, celle-ci n’est jamais débordée. Dès son ouverture et jusqu’à présent, la Cave Tsallin a été contrôlée au moins quatorze fois ! A titre de comparaison, en soixante ans, une cave à Fully a connu… trois visites administratives. Tsallin détient donc un record absolu dont elle se passerait bien.

Dénonciations à répétitions

La première salve des tracas administratifs se concentre entre octobre et novembre 2008. Alors qu’ils encavent leur propre raisin, Antonio et sa femme Natalia Pihno sont accusés de vol de vendanges et d’employer des travailleurs au noir. Ils seront blanchis, ce qui ne sera pas le cas de leur dénonciateur qui lui, par contre, a réellement dans ses rangs des ouvriers pas très en règle avec la loi… On vous laisse deviner, par ailleurs, de qui pourrait venir ces dénonciations…

La Cave Tsallin reçoit cinq visites de fonctionnaires des plus poussées. Dont une, par la police, et de nuit ! Un inspecteur du Laboratoire cantonal vient trois fois examiner les tonneaux à la lampe de poche, la tête à l’intérieur. Il cherche vainement du Pinot Noir alors qu’il n’y a pas un grain de récolté. En automne 2012, dans un reportage de «Mise au point» (RTS), le même inspecteur des vendanges assure que son «travail n’est pas de détecter les fraudes». En plus, ils ne sont que dix pour «contrôler» 700 exploitations en Valais.

http://www.rts.ch/video/emissions/mise-au-point/4427148-un-vigneron-valaisan-denonce-un-cas-de-fraudes-a-l-appellation.html

Stressés, qu’ils sont… mais toujours du temps pour Tsallin, c’est certain !   Blanchi mais énervé, Antonio Pinho dépose plainte contre les Mathier pour diffamation et tort moral. Le juge la refuse, argumentant, qu’on «ne pouvait pas savoir qu’il était innocent»!

Et la mafia russe?

Comme la Cave Tsallin ne coule toujours pas, sa comptabilité fascine l’administration fiscale et la brigade des finances. Le père d’Antonio Pinho, Arlindo, entre dans la danse. Il travaille pour les Mathier par le biais de la Société Cultivignes SA. Il doit 400 000 francs à son fils mais cela ne l’empêche pas de le dénoncer pour de l’argent au noir. Antonio étant marié à une Moscovite, il doit magouiller avec la mafia russe, c’est plus que certain, non ? Durant deux ans,  la Cave Tsallin est surveillée sans qu’elle le sache. Le rapport final de la police l’innocente complètement.

Ce qui ne freine pas, entre temps, des contrôles TVA, AVS ou d’impôts à la source. Le dernier en date, fiscal cette fois, remonte à novembre 2012. Il s’étire sur trois semaines. La moindre pièce comptable est épluchée : les experts mandatés trouvent qu’Antonio Pinho a beaucoup de frais d’avocat. Par contre, en retour de manivelle, ils auraient dû s’intéresser aux Mathier… Comment ont-ils déclaré les sommes qu’ils n’ont pas payées à Antonio Pinho ? Voilà une question dont on se réjouit d’avoir la réponse… si elle tombe un jour. Au printemps 2013, la Cave Tsallin a encore eu un treizième contrôle sur les acquits pour une vigne… qui appartient à un ami de la famille Mathier.

Antonio et Natalia Pinho parlent de leurs problèmes au Consulat de Russie.

Voici quelques semaines, un énième contrôle a tourné court. Le préposé à la tâche, ayant entendu quelques rumeurs, a voulu savoir si la Cave Tsallin était bien sous la protection diplomatique du Consulat de Russie. Les documents fournis ont très vite écourté cette tâche ! Protection diplomatique ? Oui, vous avez bien lu… Car, depuis le printemps passé, l’affaire a pris un cap qui dépasse les frontières valaisannes. Lassés de voir la justice cantonale mettre des années à traiter ou classer ses affaires, à perdre des pièces de ses dossiers, Antonio et Natalia Pinho parlent de leurs problèmes au Consulat de Russie.

Patate chaude

Dans un premier temps, c’est l’IVV qui hérite de la patate chaude et qui doit en parler à Jean-Michel Cina. C’est un dossier qui traite de viticulture et notre Conseiller d’Etat connaît très bien cette famille de Salquenen. On sait, dans le milieu, qu’il écoute beaucoup Diego Mathier quand il faut avoir un avis sur le futur du vin valaisan. En tant qu’avocat ou par le biais de la BCVs, notre Conseiller d’Etat Cina côtoie d’autres membres de la famille Mathier. Un excellent document, publié par La Gauche Valais Romand en fait une précieuse synthèse :

Sur les ondes de Rhône FM, le président du Conseil d’Etat, Jean-Michel Cina, affirme n’avoir pas de liens économiques avec cette grande cave de Salquenen et que cette cave n’a pas contribué à ses deux dernières campagnes électorales.

On peut donc imaginer qu’ils ont contribué aux précédentes, depuis la première en 1992. D’autant plus que M. Cina a siégé dans de nombreux conseils d’administrations de sociétés anonymes en compagnie de Pierre-Alain Mathier, par exemple le Chapitre des Domaines Holding ou la société financière FEI Capit al Partners. Il a également officié comme conseil pour les frères Diego et Yvo Mathier dans les conventions de 1999 et 2000 avec l’UBS concernant la faillite de Michel Clavien.

Bref, Jean-Michel Cina pourrait arrondir les angles entre Tsallin et les Mathier. Le Consul de Russie se montre assez clair dans sa formulation. Tant que le cas de la Cave Tsallin reste en suspens et non résolu, il en sera de même pour les exportations de vins valaisans en Russie. Pas une goutte ne passe.

Conseil d’Etat interpellé

Face à cette position : personne ne semble vouloir prendre de responsabilité et de décision. A la fin de l’année 2013, le Consulat de Russie reprend sa plume et interpelle cette fois tout le Conseil d’Etat valaisan… qui dégage en touche, argumentant qu’il s’agit d’une affaire privée entre la Cave Tsallin et la famille Mathier. Ce printemps, c’est au tour du Consulat du Portugal d’examiner les pièces et de décréter qu’il y a une certaine discrimination. Preuve d’une animosité croissante, la page Facebook de Tsallin a été piratée depuis plusieurs semaines et véhicule, malgré elle, plein de commentaires qui ne viennent pas de ses responsables. On vous passe les amabilités lues sur le sujet où l’on souhaite à Antonio Pinho de «crever».

Il s’agit d’une bombe à retardement, touchant la viticulture valaisanne, qui fait «tic tac» depuis trop d’années.

Si l’on excepte le volet diplomatique – dont l’info court depuis décembre dans le milieu journalistique – le cas de la Cave Tsallin a été évoqué en 2011 lorsque j’écrivais pour Le Matin. J’ai encore signé deux autres articles sur la question dans les colonnes de Vigousse entre 2012 et 2013.Il s’agit d’une bombe à retardement, touchant la viticulture valaisanne, qui fait «tic tac» depuis trop d’années. On peut se poser la question de savoir pourquoi personne ne l’a désamorcée avant. Allez sur le site de la commune de Vétroz – où se trouve La Cave Tsallin – et lisez la liste des entreprises : http://www.vetroz.ch/root/economie/liste_entreprises_suite. Si vous y découvrez celle d’Antonio et Natalia, vous êtes très forts. Comment faut-il interpréter cet oubli ? Laissons la question ouverte…

Joël Cerutti

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