DURANT L’APOCALYPSE, LE BAR RESTE OUVERT (chronique) En résumé, si j’en crois la majorité des Conseillers nationaux, je suis un sale et coûteux pauvre malade qui court chez son toubib au moindre riquiqui de rhume. Jusqu’à présent, ce n’était pas le cas. Mais ça va changer !

Comme ça, l’aile droite de mon cher pays, par 129 voix contre 54 au Conseil National, a décidé que je devais me responsabiliser. Que j’étais un inconscient de la santé. Que j’allais user le stéthoscope de mon généraliste au moindre bobo. Que pour endurcir la petite nature que j’étais, cela allait passer par mon porte-monnaie. La franchise minimale ? Indexée aux coûts de l’assurance maladie de base! Vous savez, celle qui augmente chaque année en septembre. Motion adoptée ce 8 décembre 2016, le CN attend que le Conseil fédéral lui présente un projet allant dans ce sens. OK…

Si je me base sur des chiffres datés de 2013 et publiés en 2015, un conseiller national touche 138 000 francs par an (il s’agit d’une moyenne entre la plus faible rémunération – 97 000 – et la plus haute, 234 000). Le revenu très net – du moins selon les chiffres transparents fournis par le socialiste vaudois Jean-Christophe Schwaab – serait d’environ 71 000 francs. Ce qui nous donne, par mois, dans les 6 000 francs. Ils le répètent souvent, nos parlementaires exercent la politique en tant que miliciens. Ils conservent leur « vrai » travail à côté. Comme de bosser au cœur du Groupe Mutuel ou d’autres assurances maladies. Aucun cumul d’intérêts, zéro lobby, insinuer le contraire serait d’un cynisme déplacé !

Un populisme forcené me conduit pourtant à penser que leur réalité financière, à nos personnes élues, ne correspond pas à celle des citoyens qu’ils sont censés représenter. Dont ils ont d’ailleurs une piètre estime vu qu’ils les considèrent comme des gamins immatures exigeant une ordonnance à chaque aspirine qu’ils avalent.

De par un récent passé, on a constaté que nos de plus en plus chères assurances emmagasinent des réserves délirantes – en partie constituées par les cantons ! – tel un écureuil atteint d’une boulimie de noisettes. Qu’elles violent « gravement le droit de la surveillance dans le domaine de l’assurance complémentaire » (petite tape en juillet 2015 par l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers). Dans un récent Infrarouge, par la bouche du directeur de l’Office fédéral de la santé publique, Pascal Strupler, on a découvert, atterrés, que des placements peu heureux en bourses avaient fait perdre 600 millions aux assurances en 2014.

Ces gens-là – redoutables d’intelligence et de maturité financière – n’ont donc RIEN à voir avec nous, cons de pauvres, qui réclamons un scanner dès que nous nous écorchons un doigt avec notre économe en pelant des patates. Sous la coupole fédérale, il existe bien 129 parlementaires qui pensent ainsi. Ils s’en tapent de leurs électeurs qui galèrent à moins de 4 000 francs par mois et raquent pour des primes qui dépassent de 10 % leurs revenus. Ils savent que ceux qui se muent en des Rois Lions Hurleurs à chaque hausse automnale se révèlent des Souris Aphones quand il faut changer la donne. N’oublie pas, ô peuple souverain, que tu as rejeté en 2007 et 2014 le principe d’une caisse unique. Alors, camarade tondu, arrête de pleurer, tu paies grassement tes coiffeurs !

Je l’avoue, jusqu’à présent, mon généraliste me voyait aussi souvent que mon curé à confesse. Soit (presque) jamais. À présent que mes supérieurs politiques aux QI si flamboyants ont décidé de m’infantiliser, je me tâte. Je me sens un malade très imaginatif. Quitte à devoir creuser la tombe du déficit, que je profite à fond d’une bêche que je paie déjà à prix d’or. Moi, je dis…

Joël Cerutti

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