DURANT L’APOCALYPSE, LE BAR RESTE OUVERT (chronique) Jamais, ô grand jamais, je ne remercierai assez Romain Carrupt puis Marcelline Kuonen pour leur débat autour du tourisme en Valais. Grâce à eux, j’ai rajeuni de trente ans. Surtout, ne changez rien!

Durant l’Apocalypse, les marronniers de l’été critiquent le Valais, le canton avec lequel je suis lié avec un pacte quasi faustien de sang. Un petit billet dans Le Nouvelliste, d’une jeune graine d’anarchiste, ose dire que l’accueil manque de cordialité outre en ça de par chez nous. Que certains restaurateurs pensent plus au fric qu’à la qualité de ce qui repose dans les assiettes. Qu’il faut arrêter de s’étonner si notre fréquentation touristique baisse. Sur les réseaux sociaux, l’humeur papillonne d’un partage à l’autre, ce que l’on appelle un buzzzzzzz éclair. On lui donne raison, à l’impertinent Romain Carrupt. On se demande s’il va garder sa place encore longtemps. Toujours au faîte de l’actu, la RTS et Forum organisent un débat. Où Carrupt persiste et signe: «Cela voudrait dire qu’on est peut-être en train de se rendre compte qu’il y a un problème… » En face, Marcelline Kuonen, responsable du tourisme chez Valais Promotion, défend son gagne pain de seigle et sa croûte. Elle concède. A quoi bon investir dans la promotion si cela ne suit pas autour de la table ? Mais «Il faut aussi parler des exemples positifs en Valais.»

Que ce soit Romain Carrupt ou Marcelline Kuonen, comment oser dire à quel point je les aime, je les adore? Comment décrire, en les lisant, en les écoutant, cette vivifiante poussée d’adrénaline qui a rajeuni mes artères et mon cerveau?

Au Nouvelliste, j’ai œuvré en rédactions locales entre 1986 et 1989. A l’agonie des années huitante du siècle passé, combien de téléphones, combien de lettres de lectrices et teurs n’ai-je point ouïs ou décachetées? Telle missive pour se plaindre d’une assiette de viande séchée anorexique où il fallait utiliser une loupe pour trouver des tranches consistantes. Tel appel, en dehors du 027, au sujet d’un cru proche du vinaigre balancé sur la table par une serveuse toujours étrangère s’exprimant par borborygmes. Que dire de ces additions si salées – pour des spécialités locales tenant du brouet épais – qui faisaient tant éternuer les porte-monnaie? Et il y avait en bonus, le classique indémodable du sirop qui ruine l’économie vacancières des ménages pour étancher les soifs des bambins… (pris par Le Matin dans son édition d’hier).

A l’orée des années nonante – le temps que des spécialistes concernés reviennent des vacances et que la secrétaire ait passé le message – les parades tombaient en solide parole conifère (aujourd’hui, on dit «langue de bois»).

«Faut arrêter de critiquer! Ne faisons pas d’exceptions des généralités. Chez nous, c’est toujours trop bien, si t’es pas content, tu vas en vacances ailleurs…» Qu’ils argumentaient, les officiels qui savaient.

Sans Facebook pour distribuer ça sur la toile, l’impact se réduisait à quelques lignes dans un article oublié le lendemain…

Je le redis, Marcelline Kunonen ou Romain Carrupt : un milliard de mercis! Vous m’avez rajeuni ! Et je sais que cela ne peut que perdurer. S’il existe une valeur sur laquelle je mise aveuglément, c’est sur la force d’inertie des organismes constitués. Vous savez ces grosses usines à gaz dont le rôle est d’obtenir des budgets conséquents, de maintenir une belle et grosse masse salariale au fil des ans et, après, d’investir avec quelques neurones sur le terrain. Dans trois décennies, je me réjouis de copier/coller cette chronique. C’est positif, comme le souhaite Marcelline Kuonen, je parie sur l’avenir !

Joël Cerutti

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