N’ARRETONS PAS LE PROGRES La nouvelle Poste de Froideville mesure 1 m 50 de long sur 65 de large. Elle est coincée entre les billets du Tribolo et les cagettes de fenouil. L’épicerie Mille Feuilles, chez Alain Kalbfuss, lui accorde asile. Même si elle n’était pas le premier choix du Géant Jaune. Reportage très imagé.
L’« ancienne » poste a fermé son rideau samedi après une vague manifestation réunissant 20 personnes. Elle était déjà morte depuis 2 ans. Les syndicats se sont réveillés le 4 février 2017 sous la neige. Les autorités communales étaient déjà entrées en hibernation devant toute forme de révolte. L’avis mortuaire est paru, en fond de page du 24 heures de ce lundi 6 février sur 36 lignes. Le paradoxe veut que Froideville, durant la même période, est passée de 500 à 2500 habitants. La splendide boîte aux lettres (photo) a été posée devant la nouvelle officine – l’épicerie Mille Feuilles – il y a quelques jours à peine.
La Poste existe désormais dans une épicerie de moins de 200 mètres carrés et mesure 1 m 50 de long sur 65 de large. En comptant large.
Comme dans les supermarchés – alors que nous sommes dans une petite épicerie – c’est aux clients d’appuyer sur les bons boutons tactiles. Les mêmes tarifs que ceux pratiqués dans la Grande Poste restent en vigueur, cela va de soi. Les gérants de l’épicerie – qui ont reçu une formation de 8 heures – aideront les habitants les plus âgés de la commune à passer le cap informatique. Devant l’avalanche de paquets et de lettres, reste à savoir si tout ce joli monde arrivera à s’en sortir.
Madame Nathalie, de La Poste, a été affectée, durant une semaine à la formation des clients et au suivi des gérants pour que la transition se passe dans l’harmonie la plus parfaite.
A la place de la nouvelle Poste se trouvait auparavant le rayon viande fraîche. A présent, vous pourrez y peser vos lettres, vos paquets entre le Tribolo, les fruits, les légumes et les bouteilles de rosé pour faire passer vos angoisses d’apprentis postiers.
Tout est simple. Pour vos paiements, les gérants de l’épicerie vous ouvriront un tiroir magique. Son sésame se présente sous la forme de Postcard ou Maestro. Dès lors, vous pourrez tenter de faire vos versements.
Pour vos envois, lettres ou colis, une balance hyper précise détermine le poids, la largeur, l’épaisseur de vos courriers. Une règle en plastique jaune vous indique si vous dépassez les deux fatals centimètres. Vous décidez du type d’acheminement: A, B, inscrit, etc. Tout cela en tapotant sur l’écran en priant pour ne pas vous tromper.
Nathalie, qui conseille la clientèle et les gérants, a été fort heureuse d’apprendre qu’après Froideville, la poste de Cugy risquait de bientôt fermer. Renvoyant les citoyens soit au Mont soit sur Echallens. Surprise par l’ampleur de cette désertification, la brave Nathalie s’est exclamée: « Si ça continue, on devra aller jusqu’à Genève. »
Les ajustements techniques à la caisse du Mille Feuilles, ainsi que le cahier des procédures, ne posent pour l’instant pas trop de problèmes à la famille Kalbfuss. Bon, ce lundi, ce n’était pas un jour et une heure de grande affluence.
Alain, le patron – dont l’optimisme proverbial est l’un des grands atouts de Froideville – n’a pas l’air de craindre les embouteillages ou les désillusions. Tout en sachant que certains actes notifiés ne peuvent pas être certifiés dans sa poste-épicerie. Et que l’on peut retirer – avec les cartes adéquates – 200 francs en liquide et au maximum .
L’exiguïté conviviale du Mille Feuilles n’était pas destinée au départ à accueillir ce somptueux office de poste prévu dans un autre commerce. Entre-temps, ce dernier a fait faillite. Tout ça est de bon augure et nous ne manquerons de vous narrer les prochains épisodes de ce feuilleton villageois.
Texte et photos: Patrick Nordmann et Joël Cerutti