DANSE DES URNES Beaucoup beaucoup beaucoup de personnes veulent mon amitié sur Facebook ces dernières semaines. De la bimbo décolletée au politicien du terroir, ils m’adorent tous et me promettent des tonnes de merveilles. Pour leur grand malheur, j’ai cessé de croire au Père Noël depuis un demi-siècle. (AVERTISSEMENT: CETTE CHRONIQUE CONTIENT DES GROS MORCEAUX DE METAPHORES).
Au quotidien, sur Facebook, de sculpturales créatures en bikini me demandent d’être leur ami. Elles y mettent les formes, souvent avec de forts avantages mammaires. Leurs photos me les montrent proche d’une piscine ou d’un palmier. Ces dernières semaines, comme le Valais brûle de fièvre électorale, d’autres humains me font du coude sur FB. Leurs clichés manquent de décolletés, d’étendues d’eau ou de plantes exotiques. Il s’agit de personnes qui s’impliquent en politique.
Jamais, je ne confirme l’invitation des Dames Bonnet E de Facebook. Un clic maladroit et le hacker, souvent depuis des contrées exotiques, derrière le profil bidon te salope ton mur avec des histoires où une bienfaitrice te prêterait 230 000 euros et te sortirait de ta vie si malheureuse et endettée. Quand ce n’est pas un déluge de séquences pornos… Un truc à refaire ton mot de passe dans les trois minutes, sinon tu es mort !
Chez les politiciennes ou ciens, on me promet, les yeux dans les yeux (comme il n’y a pas de décolleté) de redonner de la grandeur, de l’intégrité, une vision au Valais. Tout juste s’ils ne me proposent pas une piscine gonflable et une nana gonflante en rab. Je ne rencontre que des hommes aussi droits que leurs cravates, des femmes d’une rigueur plus stricte que leurs tailleurs. Quelque part, ils alignent force d’arguments creux pour me pirater ma voix, mon vote. Comme un hacker africain.
Tu apprécieras le parallèle, je le sais. (Note du lecteur : je n’en suis pas certain. Réduire un citoyen qui se mouille pour sa Patrie 13 étoiles au rang de Nabilla d’opérette, c’est petit, monsieur, petit…)
À presque 54 ans, vite mis au parfum par mes réalistes de parents, je ne dois plus croire au Père Noël depuis un bon demi-siècle.
Le paquet cadeau électoraliste, quelque soit la couleur politique, entoure un carton si vide. Tu excuseras mon cynisme – 49 ans de pratique, on ne se refait pas – mais le gars miraculeux qui descend le long du conduit de cheminée pour égayer le pied de mon sapin, cela ne passe pas. C’est trop gros, l’embouchure se révèle trop étroite. C’est un système de gouvernance vertical – le Sauveur Providentiel qui transpire dans la suie pour ramper vers toi. Dès que tu lui refiles ton propre cadeau – ton vote – il remonte vite sur son attelage et tient les « rennes » du pouvoir. Avec son traîneau, il vole tellement haut, qu’il en devient sourd. T’as beau gueuler, il a un morceau de Rudolph dans le pavillon, il ne te prête plus aucune oreille. (Note du lecteur : tu aurais pu dire que tu es sceptique devant la faisabilité de chaque programme, cela aurait été de la belle synthèse!)
C’est ça un système de gouvernance électoral et vertical, je te le répète.
Une personne, qui se croit leader et qui pense que son charisme rutile autant qu’une boule de Noël, qu’il va t’éclairer la voie du bonheur sur quatre ans. Au moins. Le reste de la crèche – le bœuf, l’âne gris, les rois mages, Joseph, Marie – suivra ce nouveau Messie qui marche sur l’eau du Rhône, change ce liquide en vin déclaré aux impôts et n’engage aucun survivaliste quand tu es dans le désert électoral depuis trop longtemps (et que tu te demandes à quoi ça sert ces règles un peu truquées, qu’on veut te faire jouer les yeux bandés).
Houps et re-houps, je m’égare dans les métaphores même si elles me semblent assez compréhensibles. (Note du lecteur : tu rêves ! Avec un texte aussi long, tu as un pondu l’équivalent de Guerre et Paix pour lecteurs de Facebook, il t’a déjà lâché depuis le premier paragraphe!)
Juste te dire que ce que je lis sur FB, parfois en MP, venant de papables des urnes, j’y crois autant que les gentilles demoiselles en bikini qui me prennent pour un crédule obsédé décérébré. Je préférerais nettement que l’on mette sur le tapis – et ce n’est pas ce que tu crois – une gouvernance horizontale.
Cela porte un nom, l’holacratie, cela serait bien de t’y intéresser. Je te jure que tu regarderais la campagne électorale actuelle avec un spectre différent. De gauche, comme de droite, du modéré comme de l’extrémiste, si la personne candidate conçoit le pouvoir à l’ancienne, hors holacratie, autant aller discuter avec la Mère Noël, Bonnet E, cela sera plus joyeux. Enfin, toi. Moi, je suis déjà pris.
Joël Cerutti